L’ALIMENTATION DES RIVIÈRES DE CASSIS

L’une des premières questions qui s’est posée aux scientifiques s’intéressant aux rivières sous-marines de Cassis concernait l’étendue de son bassin d’alimentation. Les premières estimations de débit montrèrent que ce bassin devait avoir une surface considérable. Nous reproduisons, ci-après le résumé d’un article d’Eric Gilli (Cliquez pour la bibliographie).

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circulations souterraines supposées en 1970


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En bleu, les roches carbonatées les plus propices aux circulations karstiques

D’après Eric GILLI en 2001. Dans les calanques de Cassis, à l’est de Marseille, les sources sous -marines de Port Miou et du Bestouan constituent d’importants indices hydrogéologiques. Connues depuis plusieurs siècles, ces sources ont fait l’objet dans les années 1970, de travaux destinés à étudier les possibilités de captage. Lors des études préalables, les débits ont été évalués à l’aide de courantographes. La compilation de ces mesures laissait supposer un débit moyen de 7 m3/s. L’eau de ces sources est censée provenir des infiltrations dans l’auréole de calcaires urgoniens du bassin du Beausset augmentées d’infiltrations profondes dans le secteur du massif de la Sainte Baume. Cependant, l’étude de bassins bien circonscrits montre que les modules d’infiltration sont compris entre 6 et 10 l/s/km². Une valeur moyenne de 8 l/s/km2 peut donc être retenue sur l’ensemble de ce secteur. Des sources aériennes sont connues mais leur débit insuffisant révèle un déficit de 4 à 5 l/s/km2 qui pourrait donc être à l’origine de l’alimentation des émergences de Cassis. Il faudrait donc envisager un bassin supérieur à 1000 km² pour expliquer le débit de Port Miou. Ce bassin théorique doit donc s’étendre au nord jusqu’au massif de la Sainte-Victoire. Les sources de Cassis pourraient donc être comparables à la Fontaine de Vaucluse et correspondre à une paléogéographie mise en place au Messinien. Une étude pluridisciplinaire reste à mener.

LES COLORATIONS

En fait, une coloration (ou traçage) est une opération complexe nécessitant du temps et de gros moyens humains avec la participation, souvent bénévole, de nombreux passionnés. Les colorants utilisés pour les traçages ont déjà une valeur non négligeable, mais il ne suffit pas de les injecter, il faut une surveillance régulière de plusieurs sources équipées de capteurs. Parfois, on a la chance que le colorant se manifeste au bout de quelques jours, mais souvent, il faut attendre de longues semaines, voire de longs mois. C’est la raison pour laquelle les colorations ont tardé à venir. Après deux colorations faites par le BRGM en 1965-66, il a fallu attendre l’arrivée d’un universitaire passionné de spéléologie, Bruno Arfib pour que des colorations bien orchestrées soient reprises en 2011, en collaboration avec Thierry Lamarque de H2O et de nombreux spéléologues bénévoles.

Colorations du BRGM en 1965-66

Dans le cadre d’un projet expérimental de captage de la résurgence de Port Miou (G. Durozoy et H. Paloc), un premier traçage avait été effectué à la fluorescéine le 6 octobre 1965 à l’embut de Coulin, au sud de la plaine de Gèmenos.  Le colorant était ressortie 42 jours plus tard à Port Miou. Le 1er décembre 1966, de la fluorescéine était injectée au tunnel du chemin de fer du Mussuguet et la coloration était apparue le 9 décembre à Port Miou.

En 1969, le BRGM prévoyait une troisième coloration dans l’embut du poljé de Cuges-les-Pins. Elle ne semble pas avoir été faite. En 1971, Raymond Monteau y tenta un traçage avec 1,5 kg de fluorescéine qui ne fut pas détectée. Il fallut attendre une quarantaine d’années pour que d’autres traçages soient à nouveau effectués. Cliquer ici pour les colorations du BRGM : 69-SGN-212-PRC

LES TROIS TRAÇAGES DE 2011

Trois traçages artificiels ont été réalisés sur l’unité du Beausset entre le 18 janvier et le 13 février 2011, sur les communes de Cuges les Pins, Ceyreste et Signes. Ils correspondent au projet KarstEAU qui étudie l’hydrogéologie de l’unité du Beausset, afin d’améliorer les connaissances sur les circulations d’eau souterraine. Le secteur étudié s’étend de Cassis à Toulon d’ouest en est, et de la Sainte-Baume à la mer du nord au sud. Les roches carbonatées forment un système aquifère complexe constituant une ressource régionale potentielle en eau potable. De plus, l’écoulement karstique donne lieu à de fortes variations de débit et de niveau d’eau dans les sources et cours d’eau. Un multi-traçage artificiel a été réalisé en début d’année 2011 dans le but de caractériser l’écoulement souterrain de l’eau à par tir du flanc sud de la Sainte-Baume et du plateau du Camp. Ce secteur est situé à la limite nord de l’unité du Beausset, dans la partie amont du système aquifère. Cette limite nord marque la limite avec le plateau de Siou Blanc, où de 1993 à 2000, neuf colorations avaient été menées d’une manière exemplaire à l’initiative de Philippe MOREL (H2O), avec l’aide des spéléologues varois.

synthèse carte traçages

 

 

Carte des traçages effectués de 1993 à 2000, sur le plateau de Siou Blanc, en bordure du Bassin du Beausset. Les parties hautes de ce bassin marquent une zone charnière entre les réseaux de Siou Blanc et ceux allant vers la Ciotat et Cassis

 

 

Elles peuvent être drainées suivant plusieurs directions principales qui sont en cours d’investigation : vers Port Miou et Bestouan – Cassis, vers La Ciotat, vers le Grand Vallat, vers le Gapeau, vers le Revest-les-Eaux, ou vers les Gorges d’Ollioules.

Trois traçages artificiels ont été réalisés :

Dans trois secteurs retenus au sud de la Sainte Baume, dans la partie amont des bassins versants côtiers étudiés :
Cuges les Pins : embut sud-ouest, au point le plus bas du poljé (traceur : Acide Amino G), le 18 janvier 2011, qui ne fut pas détecté.
Le Grand Caunet (Ceyreste-Plateau du Camp) : versant sud, au lieu-dit Mauregard dans une perte en rive gauche du cours d’eau temporaire (traceur : sulforhodamine B), le 8 février 2011. Les premières traces de coloration sont arrivées à Port Miou 13 jours plus tard.
Signes : sur la surface du Camp, dans la perte de la Revengudo s’ouvrant dans les calcaires urgoniens entre la carrière Croquefigue et la ZA de Signes (traceur : Fluorescéine), le 13 février 2011, non détecté.

Le suivi sur le terrain a été assuré par des mesures directes par fluorimètres automatiques et des prélèvements d’eau analysés ensuite au spectrofluorimètre de laboratoire.

Les injections ont eu lieu préférentiellement dans des cavités constituant des pertes actives lors des précipitations (l’eau ruisselle et s’engouffre dans ces cavités), assurant ainsi un meilleur transit du traceur à travers la zone non saturée du karst en direction de la nappe d’eau souterraine. Les pertes n’étant pas en eau lors des injections, les traceurs ont été poussés par de l’eau amenée par camions citernes des pompiers. Les pluies du 14 février 2011 ont finalement mis en eau naturellement les pertes. On pourra avoir plus de détails sur ces colorations en cliquant ici le site de Karsteau.

Perspectives. Il est certain que d’autres traçages seraient à réaliser pour finir de délimiter le bassin d’alimentation de Cassis, dont la superficie dépasse la zone encadrée par ces trois colorations. Cela fait partie des projets.

AUTRES COLORATIONS

D’autres colorations ont été faites, non pour délimiter le bassin d’alimentation des rivières, mais pour s’assurer qu’un gouffre pouvait donner accès au réseau souterrain amont des rivières. Elles ont été réalisées le 8 février 2015 à l’Aven du Mussuguet 3 et le 21 octobre 2015 à l’Aven de la Gorguette. Cliquez sur les PDF ci-dessous pour en avoir le détail.

coloration Mussuguet

coloration Gorguette

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